Je dédis ce premier article consacré à l’agriculture ancienne à mon ami JM (il se reconnaitra !) et à sa famille.
Il se trouve concerné « au premier plan », puis, doublement, attaché comme il est à Echenay et à ses terres.
Avec toutes mes amitiès.
Extrait du Bulletin de la Société d’Agriculture de l’arrondissement de WASSY
-1872-
MM. Goldsmilh cultivent, à titre de fermiers, le domaine d'Echénay appartenant à la
famille dePimodan, moyennant un fermage annuel de 14,000 fr. outre les charges
diverses d'environ 1,000 fr.
La ferme d'Echénay se compose de 160 hectares de terres labourables, et de 80
hectares de prés naturels. Le prix de location est donc d'environ 55 fr. l'hectare, plus
les charges qui l'augmentent encore. C'est une moyenne élevée pour le canton, où
généralement les terres se louent 25 fr. environ.
MM. Goldsmilh ont entrepris là une tâche ardue et difficile, possible seulement à
des cultivateurs laborieux, intelligents et possédant des avances considérables. Le
matériel d'exploitation représente une valeur importante. Les instruments perfectionnés
sont employés et appréciés à Echénay. Les terres, d'ailleurs, s'y prêtent
admirablement par l'étendue des pièces et par l'absence d'ados et de pentes rapides.
Les champs sont cultivés à plat; les roies ont peu de profondeur et, par conséquent,
ne gênent en rien le travail des machines.
. MM. Goldsmilh se louent particulièrement de l'emploi du bisoc qui leur permet
l'économie d'un homme pendant les semailles. C'est là, en effet, le grand avantage
qu'offre cet instrument, à une époque où l'on n'a jamais assez d'hommes capables de
conduire un attelage de 3 ou 4 chevaux et de tenir en même temps les mancherons
d'une charrue.
Le bétail delà ferme d'Echénay, bien que nombreux et représentant une mise de
fonds considérable, n'atteint pas encore un chiffre suffisant pour une aussi grande
étendue de terres.
Ainsi que la Commission a été à même de le voir, il se compose de :
20 chevaux de trait ; 12 génisses;
5 poulains; 6 veaux;
19 vaches; 140 brebis;
10 boeufs et godins ; 140 agneaux;
3 taureaux; 220 moutons,
plus un étalon acheté par le département et repris par M. Goldsmilh pour la somme
de 3,100 fr.
Le troupeau de MM. Goldsmith est l'objet de soins constants et appliqués avec
intelligence. Il se compose de bêtes à longue laine de race Lorraine. Tous les animaux
: brebis, moutons et agneaux qui le composent sont vigoureux et en parfait état
de santé. A quelque époque de l'année qu'un acheteur se présente, ces messieurs ont
toujours un lot de bêles en excellent état et qu'ils vendent généralement à des prix
rémunérateurs. C'est là pour eux une de leurs plus grandes sources de profits.
Chaque année ils livrent, en effet, de 150 à 200 têtes de moutons à la boucherie.
MM. Goldsmilh se proposent d'ailleurs d'introduire le sang Dishley dans leur trou
peau. Tant au point de vue de la précocité que de l'amélioration générale des animaux,
ils ne peuvent mieux faire, et la Commission ne saurait trop les engager à entrer dans
cette voie de progrès.
MM. Goldsmilh s'appliquent aussi à l'élevage du cheval pour lequel ils n'hésitent
pas non plus à faire les sacrifices nécessaires, ainsi qu'on à pu le voir par l'achat
qu'ils ont fait d'un étalon de 3,100 fr.
Indépendamment des boeufs qu'ils attellent dans les moments de presse, ils élèvent
en moyenne 4 ou 5 poulains et remontent ainsi leur écurie. Ils vendent en outre quelques
chevaux de loin en loin. Est-ce là une source de profits certains ? La Commission
ne saurait se prononcer, bien qu'il soit de toute évidence que de tous les genres
d'élevages, celui du cheval est de beaucoup le moins lucratif, et mérite presque d'être
classé parmi les maux nécessaires.
Le sol de la ferme est occupé en 1877 par les emblavures suivantes :
53 hectares blé.
50 — avoine.
4 — orge.
2 — seigle.
8 — luzerne.
3 — sainfoin.
4 — trèfle.
12 — minette.
5 — pommes de terre.
3 — betteraves.
16 — jachère morte.
Total 144 hectares
Comme on peut le voir, il ne se trouve dans la ferme que 16 hectares de jachère
morte, tout le reste est emblavé en fourrages, plantes sarclées et minettes servant de
pâturage aux moutons. C'est là sans aucun doute un résultat important obtenu dans
un pays où la jachère morte occupe une étendue de terres qui pourraient être si utilement
employées à la production des fourrages destinés à assurer la fertilité de toute
bonne exploitation. Il faut espérer que MM. Goldsmilh ne s'en tiendront pas là, et que
dans un avenir très-prochain leurs jachères seront totalement emblavées en fourrages,
en même temps que le chiffre de leurs bestiaux s'accroîtra et leur procurera par cela
même les quantités de fumier nécessaires à une exploitation de cette importance.
La ferme d'Echénay ne laisse rien à désirer sous le rapport de la tenue des cultures,
qui y sont faites avec intelligence.
Nous n'en dirons pas autant de la prairie, qui nécessiterait de grandes améliorations
qui deviendraient par la suite une source de profits considérables. Les fossés et les
rigoles d'irrigation, s'ils étaient curés, donneraient certainement lieu à une production
de fourrage beaucoup plus abondante. Certains endroits de la prairie méritent à
peine le fauchage et pourraient devenir très-bons. Mais ce résultat fâcheux ne peut
être imputé aux fermiers et provient de l'incurie et de la négligence des propriétaires
qui sont tenus, d'après le bail, de faire faire à leurs frais les travaux d'entretien
nécessaires à cette prairie trop négligée.
En résumé, la Commission a trouvé à la ferme d'Echénay des cultivateurs laborieux
et intelligents auxquels elle n'a pas hésité à décerner la Prime d'honneur offerte par
la Société d'Agriculture de l'arrondissement de Wassy.
Signé BRICHART.